Bibliothécaires Musicaux de Picardie

Xavier Galaup titrait il y a quelques jours dans son blog :

Il n’y a pas assez de musique en bibliothèque

Affirmation largement répandu par les bibliothécaires musicaux 🙂

Dans l’absolu j’ai envie de répondre oui. Mais qu’en est-il réellement ? En Picardie comme en France ?

Vous trouverez ci-dessous le fruit de ma petite étude, suivie d’une réflexion sur la place de la musique en bibliothèque et sur « notre modèle » de bibliothèque.

Sources :

• Données brutes géographiques d’activités des bibliothèques territoriales (site du Ministère de la Culture et de la Communication – Direction du Livre et de la Lecture) : LIEN
• Statistiques publiées par la DLL en 2004 : LIEN
• Synthèse 2004 de la DLL : LIEN
• Les communes de Picardie de plus de 5.000 habitants en 1999 (site Région Picardie) : LIEN
• Répertoire des bibliothèques et institutions françaises conservant des collections musicales (site de l’AIBM) : LIEN

Synthèse à partir des chiffres de la DLL :

Nombre de documents pour 100 habitants

Dépenses par habitants

Horaires d’ouverture :

Picardie : 21h30
France : 19h21

Plus de chiffres en détail :

Conclusions :

• Nous « manquons de tout » en Picardie. Comment faire pour « rattraper le retard » ?
• Les chiffres publiés ne permettent pas de savoir, concernant la musique, combien il y a de partitions, de livres et de vidéos. Le répertoire de l’AIBM semble indiquer que 3 bibliothèques ont des partitions, mais là encore, les données ne semblent pas à jour (il faut que chaque bibliothèque modifie sa fiche en ligne, ou la crée).

Réflexions sur la place de la musique en bibliothèque (de lecture) publique :

La place de la musique est aujourd’hui fragilisée par les nouvelles pratiques liées à internet. Mais n’est-ce pas dû aussi au fait que la musique ne semble pas avoir beaucoup de place dans les bibliothèques et que tous les supports ne sont pas présents ? Auquel cas, les citoyens ont raison d’utiliser internet pour se divertir, mais aussi pour chercher à se documenter.

Il est certainement le moment de (re)définir la place de la musique en bibliothèque, en prenant en compte tant notre époque que ce que représente la musique pour la population :

• La pratique musicale amateur est la première pratique culturelle des français : dossier n°65 : la pratique musicale amateur – avril 2000 du Ministère de la Culture et de la Communication.
• La musique est l’art populaire par excellence : Les français et la musique, Anne-Hélène Mangin – juin 2005, enquête TNS Sofres pour la SACEM.
• Le fonds partitions est le fonds le moins présent dans les bibliothèques : La place de la musique en bibliothèque publique, de Christian Massault- Paris, BBF 2002, t.47 n°2. loin derrière le fonds de disques.

Le nombre de documents ne suffit pas à définir la place de la musique en bibliothèque. Il faut y ajouter, la superficie et les moyens (humains et financiers).

Que faire de documents musicaux sans médiation, sans action culturelle, et sans professionnels spécialisés en musique ?

Le travail de bibliothécaire musical est aussi de documenter la vie musicale du territoire sur lequel il est, donc d’inscrire la bibliothèque dans le projet de territoire, dans la politique culturelle du territoire. N’y a t-il pas des festivals, des écoles de musique, des groupes amplifiées, des concerts partout en France, et même dans de petites communes ? Au même titre qu’il y a des accueils de classes en bibliothèque, la participation des bibliothèques dans les CLEA, des accueils de publics en difficultés…

La bibliothèque n’est-elle pas un établissement culturel, avec ses missions propres et partagées, au même titre qu’un théâtre, qu’une école de musique, qu’une salle de concert ?

La place de la musique en bibliothèque doit se (re)définir dans un contexte global d’accès à la culture et à la connaissance. Il n’y a pas que de la musique « de divertissement » dans les bacs, mais aussi de la musique savante occidentale, de la musique de collectage des peuples du monde, du jazz, du blues… Toutes ces musiques sont intimement liées à l’histoire des idées, des continents, des pays, des événements…

La place de la musique en bibliothèque doit être incluse et prise en compte dans la politique culturelle de la collectivité, en lien avec tous les événements et équipements culturels où le spectacle vivant musical est présent. La musique en bibliothèque n’est pas le lieu que des bibliothécaires, mais bien de tous les acteurs musicaux du territoire, et des usagers.

La bibliothèque dans sa globalité est « rattaché » au conseiller livre et lecture dans les DRAC et à la Direction du Livre et de la Lecture au Ministère. Pourquoi les conseillers cinéma, musique et spectacle vivant/théâtre ne sont-il pas aussi concernés directement ? N’ont-ils pas chacun leurs spécificités, au même titre que peuvent l’avoir des bibliothécaires en charge de musique ou d’image ? La « non-place » de la musique et de l’image ne vient-elle pas aussi de cela ? Du modèle même de la bibliothèque, telle qu’il existe depuis que la conservation de l’écrit existe et que nous continuons à reproduire.

L’histoire de l’image animée et de la musique enregistrée est très récente au regard du livre imprimé. Néanmoins, cette histoire a plus de 100 ans maintenant, mais notre modèle de bibliothèque est globalement encore structuré en fonction du livre imprimé.

Ce n’est peut-être pas la place de la musique qui est à revoir, mais le « modèle » de la bibliothèque publique (et non plus de lecture publique), avec toute son organisation, du local au national.